Raisonner de manière binaire rassure quand la raison nous échappe.
Philippe Lançon
Heureusement que le monde va mal ! Je n'aurais pas supporté d'aller mal dans un monde qui va bien.
Georges Wolinski
J'ai attendu ; j'ai longtemps espéré, comme nous tous, qu'on en verrait bientôt la fin. Que de chemin parcouru, depuis le premier confinement ! Une possible absurdité sur le plan sanitaire et humain, mais une bénédiction écologique, porte ouverte vers de nouveaux usages...jusqu'au passe sanitaire comme sésame quasi universel. Aujourd'hui nous en sommes là : la solution prétend être collective, immédiate, et imposée.
On a déjà entendu ça dans l'Histoire de France. En 1914, il fallait, au son du clairon, aller s'amasser aux frontières. En 1940, le contraire : il fallait se soumettre. Il n'y avait pas d'autre alternative. Contre la pollution, le réchauffement climatique, l'évasion fiscale, le saccage des services publics, la désertion de l'Etat, là pas d'urgence, on peut discutailler pendant 107 ans. Aujourd'hui à nouveau, une seule solution : se vacciner, parce qu'il est bien connu que nous sommes en guerre. À une certaine conception de la médecine (individuelle et basée sur la relation), on prétend substituer une potion miracle pour maintenir tout le monde debout au service du commerce.
Nous en sommes d'accord : la vaccination n'est pas obligatoire. Être vacciné est donc un droit, être non-vacciné aussi. Ah, mais alors je ne peux plus accéder à des biens de culture – ou de locomotion – essentiels. Je dois même, depuis peu, payer pour aller travailler. Si la simple application d'un droit me discrimine par rapport à d'autres citoyens, on peut parler de rupture du principe d'égalité ; c'est donc que ce n'est pas un droit. Mais plutôt une ces injonctions contradictoires que les psys passent leur vie à soigner : tu es libre, ne te vaccine pas. Tu veux aller dans une médiathèque / boire un coup / au spectacle : vaccine-toi...ou raque. Ça freine peut-être quelque chose, ça infantilise surtout toute une société.
Une solution pour mettre tout le monde d'accord serait de dire sagement - et ce, bien avant le Covid : que ceux qui veulent se vacciner le fassent, et foutez la paix aux autres. Mais non : la liberté vaccinale, ça serait reconnaître l'existence même d'un débat sur le sujet. C'est donc soit tout le monde, soit personne. Lors même que, selon des voix raisonnables, traiter le Covid tiendrait en une formule simple : tester, isoler, soigner. Encore faudrait-il pouvoir s'appuyer sur un Hôpital public ressuscité, tel le Phénix, de 30 ans de politique néo-libérale mortifère.
Soyons clairs : ce n'est pas ici l'endroit pour lancer un débat sur la pandémie en tant que telle. Je suis incompétent là-dessus. Si l'un de ceux qui me lit croit l'être moins que moi, qu'il lève le doigt, il a gagné. En revanche, il me semble qu'en France, la vaccination massive est d'abord un dogme, une religion. Au nom de laquelle on invente aujourd'hui, puisque l'Etat n'a pas les moyens, ni le courage, d'envoyer des fonctionnaires de police vacciner de force les populations adultes, cette saloperie qu'est le passe sanitaire. Cet outil, inédit dans l'histoire de la Ve République, s'avère parfaitement discriminatoire. Il est injuste et clivant (il est d'ailleurs fait pour ça), il exclut et stigmatise. Quelle que soit l'opinion qu'on ait sur la situation sanitaire et la politique vaccinale.
Vous avez donc à présent deux catégories de citoyens : les vaccinés, et les non-vaccinés. Les uns ont des droits, les autres des sous-droits. Le mot de « sous-citoyens » me vient à l'esprit.
Avant, la collectivité était un espace où, à côté des obligations légales, tout un chacun s'équilibrait en travaillant ses différences. Aujourd'hui, pour exister, vous devez faire la preuve (numérique, tant qu'à faire), que vous êtes conforme (1). De plus, les instances de contrôle ne sont pas qu'officielles : à chaque étape, il vous revient d'être validé par votre voisin, fliqué par votre égal.
La collectivité se clive elle-même en son milieu : ceux qui, comme moi, disent « oui, certes, le Covid-19 est un truc nouveau et pas banal, mais est-ce qu'il ne serait pas un tout petit peu en relation avec l'activité humaine (2), c'est-à-dire une politique contre laquelle des choses sont possibles, et surtout, est-ce que ça vaut de réduire en miettes en si peu de temps des libertés fondamentales ? » Et les autres, qui ne disent pas grand-chose de rationnel sauf « on s'en branle ». L'important c'est de survivre, après nous le déluge.
Avec ce champ inédit d'application du néo-libéralisme, la politique sanitaire redouble en fait une sélection jusque-là opérée uniquement par l'argent : mets tes droits entre parenthèses, ou paie pour les recouvrer. Je gage qu'un jour futur, des politologues et des avocats se pencheront sur ce brouet législatif, et qu'il ne sentira pas bon. Quand le peuple au nom duquel on parle ne se réduit plus à la somme des individus qui le compose, et devient une abstraction, c'est que la démocratie est mal barrée. La peur a gagné.
Quant aux effets de la relégation sociale que nous vivons depuis l'an dernier, nous en constatons les absurdités tous les jours : les centres commerciaux noirs de monde à côté de médiathèques et de cinémas déserts ; des écrivains en séance de signature grillagés et sous surveillance policière au milieu d'un marché public où tout le monde circule (3), le passe sanitaire ne s'appliquant ni aux lieux de culte ni aux meetings électoraux à venir...Vous avez dit lâcheté, hypocrisie ? Grande distribution et religion épargnées, culture et petit commerce sacrifiés. Un passe sanitaire ? Rien que ce triste constat devrait nous en faire vomir l'idée.
Comment continuer, chers amis, à vous entretenir d'aimables billevesées quant à l'activité du collectif MusTraDem dans un tel contexte ? D'autant que je crains que les quelques vues dont je vous fais part ici bien modestement n'engagent pas la totalité de mes camarades. J'aurais plus de mal désormais à me sentir investi d'un mandat éditorial. Je vais donc pour l'heure me mettre en réserve, et retourner à mon activité artistique ; j'en ai besoin. Portez-vous bien d'ici là, et prenez soin de vous. Pendant le spectacle, la crise continue.
Christophe Sacchettini
tofsac@mustradem.com
- https://criigen.org
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cf l'article presque drôle de Didier van Cauwelaert L'écrivain, les courgettes et le pass sanitaire (Le Point, 10 09) https://www.lepoint.fr/debats/l-ecrivain-les-courgettes-et-le-pass-sanitaire-par-didier-van-cauwelaert-10-09-2021-2442600_2.php
Le stage d'improvisation cuvée 2022 aura lieu à Bourgoin-Jallieu (38) du 20 au 26 février, avec une équipe remaniée: Jérémie Mignotte, Norbert Pignol, Christophe Sacchettini, Jean-Pierre Sarzier, et en invité spécial Jean-François Vrod. Ouverture des inscriptions le 12 novembre.
L'équipe d'In Situ Babel (Marie Mazille, Léa Dessenne, Norbert Pignol, Patrick Reboud et Christophe Sacchettini) effectue son dernier glanage sur l'agglomération d'Annemasse (74) du 15 au 17 novembre. Rendez-vous le 14 janvier à l'Espace Louis Simon de Gaillard pour la restitution finale.
Le bédéconcert de Stéphane Milleret et Sébastien Tron, d'après la BD de Chloé Cruchaudet, sera visible le 19 novembre à Alby-sur-Chéran (74), et le 30 novembre à Gray (70). Infos ici.
Le projet Confluences nordiques mené par Frères de Sac 4tet avec les élèves et enseignants de l'ENM de Villeurbanne, consacré aux musiques anciennes et / ou traditionnelles nordiques, verra sa restitution le 20 novembre à Villeurbanne (69).
La série pédagogique de l'année, c'est la 5e saison des vidéos péda diato, avec cette année l'ami Cyrille Brotto !
Mais c'est aussi courant décembre que sortiront sur notre chaîne Youtube, en accès libre, les 5 vidéos de la série En revenant des Montagnes : danses traditionnelles de Savoie, dansées par un groupe d'excellents danseurs amateurs sous la conduite de Geneviève Chuzel, jouées par Patrick Mazellier et Frères de Sac duo, filmées par Léo Dadin et Milena Mogica-Bossard ; une commande du Musée Savoisien de Chambéry et du Département de la Savoie.
- Rendez-vous quasi quotidiens sur notre profil FB pour y suivre l'actualité des artistes du collectif : concerts, bals, stages, clips, éditos...et de quelques-uns de nos amis.
- La page FB d'In Situ Babel qui vous donne des nouvelles de la résidence dans l'agglo d'Annemasse
- La page Mydriase (stages)
- Enfin, la page spécifique de MusTraDem et celles des artistes du collectif : duo Brotto-Milleret/Groove Factory, Frères de Sac 4tet, Djal, Stéphane Milleret, Norbert Pignol.
Saga épique, comique et drolatique du confinement en 107 couplets, le livre-DVD Au premier jour de la Confine est en phase finale de fabrication. Aidez Marie Mazille, Fabrice Vigne, Capucine Mazille et Franck Argentier en ululant ici avec eux, sortie prévue pour Noël.
Jenny Demaret démarre cette année un atelier de musique suédoise aux ADEM (Ateliers d'Ethnomusicologie) de Genève. Inscrivez-vous !
Le spectacle Demain l'Océan (Françoise Barret et Marie Mazille) se jouera le 21 novembre à Lyon.
Jean-François "Jeff" Dantin, photographe célèbre sans qui le milieu trad français ne serait pas ce qu'il est, n'a plus d'appareil. Vous pouvez contribuer ici à la campagne Un nouvel oeil pour Jeff Dantin.
Le CD Dames d'Ardèche nous dévoile quelques-uns des collectages de l'ami Christian Oller dans le Haut-Vivarais. A se procurer d'urgence chez Phonolithe.
Ici la souscription pour le livre-Cd Violoneux Savoyards, projet lancé par l'association annécienne Terres d'Empreintes.
Le CD Cornemuses / Terres anciennes est disponible auprès de Jean-Claude Blanc : jc.blanc2@wanadoo.fr
Enfin, impossible de finir cette rubrique sans mentionner le concert de La Nòvia le 27 novembre à la Gaîté Lyrique (Paris 3e), qui interprètera à cette occasion la célèbre pièce de Terry Riley In C.
Adeline Guéret / Marie Mazille "A la verticale, à l'horizontale" (CD)
Kaz Kan Zie "Pays de Kau" (CD)
Cyrille Brotto "Valse de l'instant" (Vidéo pédagogique)
Duo Brotto-Milleret "La part des anges" (Recueil de partitions et tablatures)
