Mustradem - Musiques Traditionnelles de Demain
Newsletter #69 mars avril 2021
Édito Je suis Charlie

Plus j'avance en âge, plus je tiens les paroles et les actes comme deux dimensions des possibilités humaines non seulement complémentaires (mais pas complètement, l'une n'étant pas la moitié manquante de l'autre), mais qu'il faudrait se garder de confondre et de coucher en un même fleuve, en route vers un futur réconcilié. Je pense même qu'un des enjeux de l'équilibre humain consiste à faire cohabiter, dans un temps donné, des mots et des actions souvent contradictoires. Plus aucun homme de bien aujourd'hui ne prend pour argent comptant certaines paroles entendues dans le flux médiatique, qui voudraient faire croire qu'elles vont être suivies d'effets ; ou alors il s'agit là d'un dangereux idéaliste qu'il convient, pour sa santé mentale, d'éclairer au plus vite sur l'état des choses.

C'est à leurs actes qu'il faudra juger l'an prochain nos politiques, et non à leurs phrases, aberrantes et absurdes (alors qu'elles se voudraient sans doute performatives), qui cherchent frénétiquement à résumer en peu de mots simples pour le peuple, une situation sanitaire à laquelle eux-mêmes ne comprennent rien, et dans laquelle ils n'ont vite cherché que le moyen que les affaires continuent. Mais pour cela il faudra des chiffres, des analyses, des propositions, retrouver à la fois les moyens d'un libre arbitre, et d'une pensée complexe. Jugez-moi à mes actes, non à mes paroles, dit Clint Eastwood quelque part (1). Ouaip.

Donc, submergés par le flot de paroles uniquement spéculatives qui nous abreuve au quotidien (le virus va-t-il...les salles de spectacle vont-elles...le vaccin peut-il...etc.), et dévorés par le feu de l'inaction, nous tournons sur nous-mêmes dans la nuit, cherchant désespérément où poser nos valises ; à défaut de concert, du concret. D'aucuns se remettent en question, pensent tout arrêter (lors que tout est déjà arrêté), se reconvertir ; d'autres transmutent leur angoisse du lendemain en colère, las de subir une politique sanitaire injuste, arbitraire, et pour tout dire idéologique.
Certains d'entre nous retrouvent les moyens d'aller jouer partout, dans la rue, à moyens légers (Norbert Pignol et Léa Dessenne), à la demande de pouvoirs publics qu'on sent fiers de pousser ainsi des artistes pâles et mal nourris, à se réinventer à l'air libre de la bonne bise hivernale (2). Stéphane Milleret et Cyrille Brotto mettent à profit la distance qui les sépare et leur excellente connaissance des outils numériques pour faire encore mieux ce qu'ils faisaient déjà hier. Frères de Sac 4tet construit des châteaux en Espagne avec l'ENM de Villeurbanne. Nos terrains de jeu nous étant interdits, nous en cultivons les abords, les à-côtés.

Qu'il était riche et beau, ce stage d'improvisation « à distance » que la dream team Mydriase a proposé en place de notre équipée annuelle à Bourgoin-Jallieu ! Moi le premier, je n'y croyais pas, mais comme je dis toujours oui, j'ai joué le jeu. Et le rapport noué cette semaine-là avec les 22 stagiaires devant le trône de leur canapé n'était pas tout à fait de même nature qu'à l'habitude. Mais l'émotion était là. Ce stage n'était pas un pis-aller, c'était là tout le pari. Il nous a fallu, une fois de plus, remettre en jeu nos pratiques, mais n'est-ce pas la nature de l'improvisation de pouvoir souffler n'importe où, comme une brise qui révélerait à elle-même  le grain frissonnant d'une peau vivante  ?

Le danger serait, bien sûr, que ces pratiques numériques deviennent la règle, pour un ensemble de raisons que tout le monde comprend. En attendant, on fait ce qu'on peut. C'est-à-dire, au final, ce qu'on veut...dans un contexte qui nous échappe et une cage qui se rétrécit de plus en plus.

L'équipe In Situ, comme hier, s'adapte à des conditions sanitaires difficiles sur l'agglo d'Annemasse, qui rendent encore plus évidente l'hétérogénéité des terrains sur lesquels nous intervenons. Malgré tout, même en passant un temps démesuré à faire et défaire, on fait le job (cf ci-dessous), parce que nous sommes là pour ça. Quant à la fin de la résidence In Situ à Très-Cloîtres, dans le quartier historique de l'immigration grenobloise, à la demande du CIMN, elle s'est soldée fin décembre, après 6 mois d'interruption, par un concert dans le beau Théâtre Ste-Marie-d'en-Bas (ancienne église, belle acoustique, hauteur sous plafond, me lasse pas de ce plateau) ; cela nous a valu des retours d'amis reculés qui sans cela ne nous auraient jamais vus sur scène, et vous pourrez bientôt le voir en ligne (cf ci-dessous).

N'empêche, toutes ces activités, aussi stimulantes soient-elles, révèlent parfois une distance vertigineuse avec le métier tel que je le conçois, à l'ancienne : aller sur scène, dans l'arène, y faire ce qu'on sait faire et un peu plus. Là, on se l'enfourche, le fucking tigre.
Quant à moi, prêt naguère à me rouler par terre sur le plateau, au sein de l'équipe In Situ, où tout le monde sait à peu près tout faire mieux que moi, j'ai trouvé ma place : pour l'heure je dresse des plannings, bricole des projets, je trace des feuilles de route, des ordres de mission. J'appelle au téléphone mes 4 équipiers qui transpirent leur daïquiri au bord d'une piscine de rêve (de rêve gris parce que la télé est en noiréblanc), et je dis dans l'appareil : « les chéris, le mois prochain on va visiter 2 écoles primaires, un collège et deux associations. L'objectif c'est faire 8 chansons, filmer le prochain épisode de la websérie, et préparer le concert. Faites votre sac. »

Je réalise ainsi le vieux fantasme du téléphile des années 70 devant la série Drôles de dames (Charlie's angels en VO). Bref, je suis Charlie. My name is Charlie. Je donne les instructions. Et on voit de moins en moins mon visage.

Christophe Sacchettini
tofsac@mustradem.com 

 

 

 

  1. Il est possible que j'aie inventé cette citation que je ne retrouve nulle part ; j'ai d'ailleurs chez moi, dans un placard, un Clint Eastwood sur mesure, entièrement fabriqué par mes soins, dont je tiens l'examen à disposition.

  2. Ainsi, quand le Président de tous les Français pousse publiquement les artistes à faire des galipettes avec un plantigrade connu pour sa dangerosité, on hésite à le faire mettre en examen, suivi d'isolement immédiat, pour incitation à la violence, à la zoophilie, ou au suicide, toutes choses répréhensibles comme on sait.

 
STAGE DE PRINTEMPS

Nous avons dû renoncer au stage de Pâques 2020 ; faire une croix sur le stage d’août ; adapter en visio le stage d’impro de février. Le stage de Printemps 2021, comme vous vous en doutez, n’aura pas lieu en vrai. Les stages Improviser à l’accordéon diatonique, Musique d’ensemble et Ecriture de chansons sont annulés. Stéphane Milleret et Patrick Reboud vous proposent un stage Harmonisation et arrangement en distanciel les 10 et 11, puis 20 et 21 avril ! Programme et inscriptions ici.

Quant au stage d'été, nous communiquerons sur sa faisabilité courant mai.

 
IN SITU ALMA TRES-CLOITRES

En 2019-2020, à la demande du CIMN (Centre International des Musiques Nomades). l'équipe In Situ a collecté dans le quartier Alma Très-Cloîtres, haut lieu de l'histoire de l'immigration au Centre Ville de Grenoble.

Le concert de restitution de l'aventure In Situ Alma Très-Cloîtres, filmé le 19 décembre au Théâtre Ste-Marie-d'en-Bas, sera notamment rediffusé samedi 20 mars à 20h30, à la suite d’une table ronde numérique (19h) qui réunira plusieurs acteurs du projet autour de la thématique « Comment les projets participatifs, associant amateurs et professionnels peuvent être des sources de synergies et de cohésion sociale sur un quartier, un territoire ? »

 
IN SITU BABEL

L'équipe d'In Situ Babel (Marie Mazille, Norbert Pignol, Patrick Reboud, Christophe Sacchettini, Fabrice Vigne et Léa Dessenne) continue son travail sur l'agglo d'Annemasse (74) jusqu'à fin 2021.

Une websérie est en route, avec la Cie Les Veilles (1er épisode visible ici), et un livre est à l'étude pour rendre compte de cette résidence qui continue contre vents et marées pandémiques. En attendant, rendez-vous sur la page FB.

 
BROTTO-MILLERET

D'après nos informations, le recueil de partitions est proche du bouclage et sera disponible courant mars, avec le prochain clip du duo  !

Stef et Cyrille seront du 21 au 27 mars aux Roux d'Abriès (05) pour deux stages « accordéon diatonique » et « musique d'ensemble », avec un volet « découverte du Queyras en raquettes ou skis de fond » (on attend de voir lequel des deux va s'y coller). Infos ici mais stage COMPLET !

 
VIDEOS PEDAGOGIQUES

Toutes nos vidéos pédagogiques (accordéon diatonique, chromatique, clarinette, harmonie) sont en vente ici. Chaque épisode de la saison 4 des vidéos diato (Stéphane Milleret) est disponible le 1er vendredi du mois jusqu'en juin.

La saison 2 de l'indispensable série collective Histoire de l'harmonie  (Mignotte / Milleret / Pignol / Reboud / Sacchettini / Sarzier) est enfin disponible.

 

 
COPINAGE

Entre mars et mai 2020, on a pu voir 47 « concerts aux fenêtres » du 170 galerie de l'Arlequin à la Villeneuve de Grenoble. Un livre est né. Un concert-souvenir a eu lieu le 2 octobre 2020, cette fois à l'horizontale, sur la scène de l'Espace 600, avec les chanteurs amateurs du quartier, sous la conduite d'Adeline Guéret et Marie Mazille, avec la participation amicale de Christophe Sacchettini et Pierre Marinet. On peut le voir ici. Prochaine étape (courant mars) : le CD !

 

 
FAÏCEBEURK

 

  • Rendez-vous réguliers sur notre page FB pour y suivre l'actualité des artistes du collectif  : bals (euh non), concerts (non plus), stages (ou pas), clips, éditos.
  • La page FB d'In Situ Babel qui vous donne des nouvelles de la résidence dans l'agglo d'Annemasse
  • La page Mydriase
 
COMMUNIQUE DE PRESSE ET PETITION

Nous relayons volontiers le communiqué de presse contre l'autorisation du port d'armes dans les établissements culturels, à lire ici.

Enfin, ça n'est pas avec une deuxième année blanche qu'on va "sauver les intermittents" (c'est avec du boulot pour tout le monde ou, mieux, avec de l'intermittence pour tout le monde), mais on peut quand même signer la pétition ici.

 
BOUTIQUE

Les nouveautés de la boutique, arrivées toutes chaudes de l'AEPEM.

Los cinc jaus "Baissatz-vos montanhas"
Jean-Marc Delaunay "Violon / Le son de l'Artense"
Grégory Jolivet "Vielle à roue"
La Bricole "Jour de malheur"
Tres "Avanç'un pauc lo pas"
Duo Rivaud / Lacouchie "Zo !"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
          
 
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